En récidive, le chauffeur d'un fourgon qui a tué un policier encourt la perpétuité
Le procès de Farès D., qui reconnaît être le conducteur d'un fourgon en fuite ayant mortellement fauché un policier au cours d'une opération nocturne à Bron, en banlieue de Lyon, s'est ouvert lundi devant les assises de Lyon.
En récidive, le chauffeur d'un fourgon qui a tué un policier encourt la perpétuité
L'accusé, seul dans le box, est emmitouflé dans une doudoune noire. Farès D., 24 ans, le visage encore juvénile, se présente dans la salle de la cour d'assises de Lyon. La famille de la victime, qui s'est constituée partie civile, ne peut s'empêcher de remarquer: "C'est un gamin".
L'émotion est forte pour la mère et les deux frères de la victime. Franck Labois, gaillard de 1m90 passionné de hockey sur glace, était le dernier d'une fratrie de trois.
Farès D. est accusé de meurtre sur personne dépositaire de l'autorité publique dans l'exercice de ses fonctions. Parce qu'il est en situation de récidive criminelle (pour des faits commis lorsqu'il était mineur), il encourt la réclusion à perpétuité.
Aux premières questions du président de la cour, l'accusé répond laconiquement: oui, il était bien le conducteur du fourgon qui a percuté le policier. Non, il n'avait pas l'intention de tuer ce dernier.
Pour bien comprendre les circonstances dans lesquelles le policier est décédé, il faut se replonger dans une enquête de la sûreté départementale, qui surveille depuis un certain temps une équipe de malfaiteurs. Une quinzaine de faits leur sont imputés, selon la même méthode: des vols de fret avec violences en se faisant passer pour la police grâce à un gyrophare qu'ils transportent.
Dans la nuit du 10 au 11 janvier 2020, avec le soutien du Groupe d'appui opérationnel (GAO) auquel appartient Franck Labois, les policiers décident de les interpeller, après avoir observé en flagrance un nouveau vol. Cette nuit-là, ils s'en sont pris à un chargement de lessive sur une aire d'autoroute de l'Isère.
"Des opportunistes", dit l'un des témoins, major de police, décrivant des malfaiteurs parfois mal préparés, qui ne font pas de repérages, font parfois des erreurs grossières comme confondre le camion d'un fabricant de fromage avec celui d'un transporteur de cigarettes.
"Beaucoup de regrets" -
La tentative d'interception, menée par le G.A.O, se met en place un peu plus tard, lorsque le fourgon Volkswagen qui transporte la marchandise volée revient en périphérie de Lyon.
Le fourgon se retrouve coincé par deux véhicules, s'immobilise brièvement, puis fait brusquement une manoeuvre pour se dégager. Et percute de plein fouet Franck Labois, dressé sur son chemin arme au poing.
Il ne sera relevée aucune trace de freinage au sol. Les prélèvements laissent à penser que le policier a été traîné sur une dizaine de mètres. Son gilet par balles a été déchiqueté sous la violence du choc. Il décédera trois jours plus tard à l'hôpital.
Les occupants du fourgon l'abandonnent dans la précipitation. Les objets retrouvés, dont des gants en partie calcinés, et des géolocalisations téléphoniques vont permettre de remonter, grâce à des analyses ADN, à plusieurs suspects, parmi lesquels Farès D., interpellé le 16 janvier.
Selon les enquêteurs, il reconnaît immédiatement qu'il est le conducteur. Il dit avoir pensé "qu'il avait la place de passer" pour s'enfuir, rapporte le directeur de l'enquête.
Ses conversations depuis la prison où il est en détention provisoire sont sur écoute. A ses proches, il affirme que le policier s'est mis devant lui, et voulait "jouer au superhéros". "C'était lui ou moi", affirme-t-il, selon les retranscriptions.
La défense, de son côté, interroge les témoins sur le caractère intentionnel de l'homicide, souligne qu'au cours de ces écoutes l'accusé parle d'accident. Et commence à questionner le dispositif mis en place pour intercepter le fourgon.
Après deux témoignages d'enquêteurs, le président de la cour redonne la parole à l'accusé. "J'ai beaucoup de regrets, malgré ce que j'ai pu dire", assure Farès D. "J'ai pas voulu percuter M. Labois", réitère-t-il. "J'ai jamais voulu en arriver là".