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Thomas, 28 ans, piégé par l'anoréxie


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11 réponses à ce sujet

#1 Guest_viKKing_*

Guest_viKKing_*
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Posté 30 novembre 2015 - 09:54

http://www.estrepubl...-par-l-anorexie

 

Jeune policier affecté dans une brigade de nuit à Paris (19e ), Thomas cumule les blessures et les coups durs. Un régime le fait basculer dans l’anorexie. Le garçon de Bart (Doubs), qui rêvait de sauver le monde et les gens, est décédé en mai dernier. Du haut de son 1,81 m, il pesait moins de 40 kilos.

 

«Thomas est mort de faim. Oui, c’est ça l’anorexie : on se laisse mourir de faim. »

 

Les mots claquent comme un coup de fouet. Froids. Durs. Mais si justes. Dans un salon baigné d’un soleil automnal dont les rayons ont bien du mal à réchauffer une famille brisée par la perte d’un enfant, Isabelle et Michel Perron racontent « une maladie mortelle, fulgurante ». Celle qui a tué leur fils. Avec une pudeur extrême. Sans chercher la compassion. Ni l’empathie. Seulement avec des mots qui disent leur désarroi face à un mal qui déboule insidieusement sans donner son nom. Au départ, c’est un petit régime pour perdre quelques rondeurs. Rien de plus. Rien de moins. À l’arrivée, c’est un corps sous-alimenté, un cœur fatigué, un cerveau qui n’est plus en capacité de percevoir la ligne rouge franchie. Celle qui bascule vers la mort. À force de perdre des crans de ceinture, Thomas Perron s’est évaporé. Il est décédé le 16 mai 2015. Il avait 28 ans. Ce gaillard de 1,81 m pesait moins de 40 kilos. L’ombre de lui-même.

 

Thomas Perron était policier. Depuis tout gosse, il voulait sauver le monde. Protéger les gentils des méchants. « C’était un idéaliste confronté à un monde qui n’est pas celui qu’il imaginait », avoue son père, éducateur judiciaire à Montbéliard.

 

 

« Un 9 mm à opposer à une kalachnikov »

 

« Son métier l’a autant détruit que l’anorexie », lâche Pierre Schlatter, son grand-père, commandant de police à la retraite. 76 ans, dont 37 dans la maison tricolore. « J’ose dire que si Thomas n’avait pas été policier, la dépression et l’anorexie ne seraient pas venues le jeter au tapis. » Pierre Schlatter n’entend pas accabler une corporation qu’il respecte trop, ni chercher des responsables. Seulement tirer la sonnette d’alarme. Ce qu’il fit en juillet dans une longue lettre adressée au ministre de l’Intérieur Bernard Cazeneuve. « Les situations sur le terrain des agents en première ligne nécessitent un appui digne de ce nom, aussi une aide en cas de perdition car Thomas, abandonné sur le plan professionnel, perdait pied… », écrit-il au ministre. « Thomas s’est trouvé en état de dépression mais continuait à faire face et ce, sans aucun suivi psychologique sollicité par la hiérarchie. »

« Thomas était malade », poursuit l’ancien officier CRS et de corps urbain. « L’anorexie est un mal terrible pour les hommes adultes. Je vous écris, Monsieur le Ministre, pour solliciter vos services afin qu’ils accompagnent les agents lors des pertes de points d’appuis, lorsqu’ils glissent sur la pente dangereuse de la dépression, que les chefs de service fassent le signalement aux services sociaux, que les agents ne soient pas abandonnés. Il faut de la rigueur mais aussi de l’humanité. » Le ministre de l’Intérieur ne lui a jamais répondu.

 

Enthousiaste, énergique, « cabotin aussi car il n’était jamais le dernier quand il s’agissait de faire une blague potache », se souviennent ses proches, Thomas donne du relief à ses rêves de gosse en 2005. Il endosse l’uniforme comme adjoint de sécurité à Belfort. Deux ans plus tard, après avoir réussi le concours de gardien de la paix, il intègre les rangs de l’école de police à Montbéliard. Le temps est venu de sa première affectation. Dans un commissariat à Paris, 19e. En brigade de nuit. Pas le plus facile pour un jeune flic. Thomas ne s’en plaint pas. La cohésion est forte au sein du service de nuit. Un job en état d’urgence avec une délinquance de plus en plus violente, « qui ne respecte plus rien, surtout pas l’uniforme », abonde Pierre Schlatter. « Il y a quelques années encore, entre les honnêtes gens et les voyous, il y avait un rempart. C’était la police. Ce rempart s’est écroulé. » Les coups durs successifs vont peser lourd sur le moral du jeune policier. Il est gravement blessé en maîtrisant un individu arrêté pour la 97e fois (cette fois-là au volant d’une voiture volée) et qui tente de s’échapper du commissariat. Lors d’une autre interpellation, il est mordu par une femme porteuse de l’hépatite C puis victime encore de violences lors d’une arrestation (luxation de la mâchoire). « Il est aussi durablement éprouvé par l’assassinat de deux de ses collègues de la brigade anticriminalité de nuit, volontairement fauchés et tués par une voiture bélier », se souvient son grand-père. Thomas et ses collègues furent les premiers à arriver sur les lieux.

 

Et puis, il y a eu les convocations de l’IGS (Inspection générale des services). À chaque incident, le policier doit s’expliquer. Comme le jour où Thomas, chef de patrouille, part sur une intervention dans un véhicule de police secours. Les freins de la voiture sont déficients. Le problème a été plusieurs fois signalé. Ce jour-là, les freins lâchent. La voiture part dans le décor. Thomas est convoqué pour s’expliquer. Il argumente en évoquant l’état déplorable du véhicule. On lui répond que connaissant l’état du véhicule, il devait partir sur l’intervention à pied ! Fermez le ban. Forcément, ça finit par saper le moral.

 

Alors quand à la mi-octobre, Pierre Schlatter voit défiler à Belfort comme ailleurs en France, les policiers qui dénoncent leurs conditions de travail, le déficit chronique des effectifs, la pression et la culture du chiffre, le vieillissement du parc automobile, leurs moyens désuets face à une délinquance très armée (« un 9 mm à opposer à une kalachnikov »), il a furieusement envie de mêler sa voix aux leurs. Encore plus à la mi-novembre à la suite des terribles attentats de Paris avec une police aux premières loges canardées par des armes d’assaut. Sauf que la donne a changé. On est en guerre. La police va recruter.

 

 

« J’ai perdu la clef pour me sauver »

 

Thomas Perron, il était fier de porter l’uniforme. Heureux d’être un gardien de cette paix qu’il faut à tout prix protéger. La paix, lui, il ne l’a pas trouvée. À Paris depuis six ans, il veut voir d’autres horizons. À la suite d’une blessure, l’administration lui propose de choisir entre une mutation et un échelon d’avancement. Il choisit la mutation. Il n’aura ni l’un, ni l’autre ! Au cumul des blessures au corps et à l’âme s’ajoute le régime. Thomas n’était pas gros. Seulement « bien portant », costaud avec ses 93 kilos pour 1,81 m. Il travaille la nuit, s’alimente mal. Souvent de « la bouffe rapide ». Ils sont plusieurs dans son service à se mettre au régime. Un déclencheur collectif. Il supprime le sucre, les graisses, calcule chaque calorie. Perdre du poids devient obsessionnel. « Au départ, c’était un simple régime commencé à l’été 2013 », raconte Isabelle, sa maman. « Un an plus tard, ça vous saute à la figure. Il a perdu 40 kilos. Les clignotants s’allument. Vous lui dites stop. Tu mets ta vie en danger. Mais lui, il ne voit plus la réalité objective. Seulement cette impression de légèreté, cette sensation de se sentir propre, nettoyé. Quand on lui dit qu’il va vers la mort, que le pronostic vital est engagé, il répond : « faites-moi confiance, laissez-moi le temps. » L’anorexique est manipulateur. « L’arme d’un alcoolique pour se détruire, c’est la bouteille. L’arme d’un anorexique, c’est lui-même », ajoute Michel Perron. « Il se bat contre lui-même. C’est une souffrance extrême. Quand il était en grande dénutrition, Thomas nous disait : « je sais qu’il y a quelque chose en moi contre lequel je n’arrive pas à lutter. » Pierre Schlatter se souvient parfaitement d’une phrase que lui répétait à l’envi son petit-fils : « J’ai perdu la clef pour me sauver. »

 

« Après un arrêt maladie lié à son grand état de faiblesse, courageusement il a repris le travail. Il avait envie d’aller bosser, de vivre. Au fil du temps et des kilos perdus, il a été capturé, emprisonné, piégé par l’anorexie. À la fin, il avait conscience d’être allé trop loin, de mettre son corps en danger mais il attendait encore un déclic », confie Isabelle. La mutation est arrivée. En septembre 2014 dans la CRS 38 à Mulhouse. Quasi trop tard. La maladie est installée. « Comme un cancer de la vie dont le malade refuse la chimiothérapie. Quand on pense qu’on n’est pas malade comme Thomas, on ne peut pas guérir puisque pour être soigné, il faut accepter d’être malade. »

 

Avec Thomas, Isabelle et Michel Perron ont arpenté les couloirs des urgences, des hôpitaux. « On a rencontré des médecins très chouettes. Vécu des instants difficiles, aussi, quand on vous dit à l’hôpital qu’il n’y a pas de lit et que vous repartez avec votre fils qui tient à peine debout. Monter un escalier équivalait pour lui à grimper l’Everest. » Difficiles encore quand, au lendemain d’une admission à l’hôpital, il prend ses cliques et ses claques pour rentrer chez lui. Parce que Thomas est majeur. Il lui suffit de signer une décharge pour quitter l’hôpital. Malgré sa légèreté corporelle, son cœur qui s’essouffle, son corps qui s’épuise, il se sent fort.

« Face à l’anorexie de l’homme adulte, (pathologie en recrudescence), le monde médical est un peu paumé, démuni. Le milieu hospitalier a ses limites. Il ne soigne que le physique, assure la pose d’une sonde gastrique ou le suivi cardiologique », soupire Michel Perron. Thomas était pris en charge en ambulatoire dans une clinique privée près de Dijon, qui accueille les malades souffrant de troubles du comportement alimentaire via un travail associant la diététique, la réappropriation de son corps et le psychologique. Le mal était trop ancré.

 

Cavalier, Thomas rêvait de s’offrir un cheval pour son anniversaire. Son corps avait épuisé ses dernières maigres réserves. Il est décédé juste un mois avant son 29e anniversaire. À Bart, pour ses obsèques, il y avait là ses très nombreux amis, collègues parisiens et l’ensemble de la CRS 38 venus rendre hommage à un garçon rieur qui rêvait d’un monde juste meilleur.

 

Françoise JEANPARIS

+++

Un bel hommage dans cet article. Je m'associe à la douleur de la famille de Thomas ayant été confronté à cette maladie par un de mes enfants. On ne voit rien venir, c'est une maladie insidieuse qui ne se guérit pas vraiment.

 

Repose en paix Thomas, collègue.



#2 outchak

outchak

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Posté 30 novembre 2015 - 14:23

C'est triste, très triste, je m'associe également à la douleur de sa famille.
RIP cher Thomas...

#3 mike69

mike69

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Posté 30 novembre 2015 - 14:41

Condoléances à sa famille et collègues.

#4 TAZ MAN

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Posté 30 novembre 2015 - 15:01

Sincères condoléances à sa famille, ses proches et ses collègues.



#5 Jean-François

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Posté 30 novembre 2015 - 16:21

Sincères condoléances à la famille, proches et collègues.

#6 BADBOY

BADBOY

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Posté 30 novembre 2015 - 17:00

Toutes mes sincères condoléances.



#7 suzuk81

suzuk81

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Posté 30 novembre 2015 - 18:58

Sincères condoléances à sa famille, ses proches et ses collègues.



#8 kumi18

kumi18

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Posté 30 novembre 2015 - 19:34

Histoire émouvante!

Sincères condoléances



#9 GillesPM06

GillesPM06

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Posté 30 novembre 2015 - 21:32

Quelle tristesse ... que dire ...

Tout mon soutien à sa famille et ses proches.

Qu'il repose en paix maintenant ...

#10 samourai

samourai

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Posté 01 décembre 2015 - 12:36

très belle histoire de ce gardien de la paix qui ne s est pas ménagé et qui a tout donné a la police.

toutes mes condoléances a sa famille  RIP.



#11 androlive

androlive

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Posté 04 décembre 2015 - 10:29

Sincères condoléances à sa famille, ses proches et ses collègues.



#12 thierryg

thierryg

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Posté 04 décembre 2015 - 11:50

Pas de mot, que des larmes.... RIP collègue






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